Un changement d’air bienvenu

Mickaël Pietrus a un jeu fait pour la NBA. Tout le monde le sait. Mais jusqu’à cette saison le français avait eu bien du mal à faire son trou dans le monde très fermé des joueurs non américains influents. Dans l’ombre de Tony Parker et, à un degré moindre, Boris Diaw, l’ancien palois, a très peu goûté au coaching façon Don Nelson. Utilisé avec parcimonie et au gré des humeurs de son entraîneur, Pietrus n’a jamais réussi à véritablement convaincre l’adepte du tout pour l’attaque. Un pistolero dans une équipe de gâchettes… Une situation idéale pourtant ! Sauf qu’à trop vouloir engager des snipers, Nelson s’est une nouvelle fois retrouvé avec un groupe déséquilibré, allant même jusqu’à faire jouer Mike Pietrus en poste 4 ! Forcément faire jouer un arrière shooteur à la place d’un ailier fort ne peut avoir que des conséquences fâcheuses. Pour l’équipe comme pour le joueur. Lassé de ce coaching à l’instinct Pietrus s’en est allé, laissant derrière lui cinq saisons et 310 matchs sous le maillot des Warriors. Que retiendra-t-on de son passage du côté de la « bay arena » ‘ Des points, des smashs qui lui vaudront le surnom de « Air France », une belle saison 2006-2007 couronnée par l’élimination des Mavs et le fameux « We Believe ». On retiendra surtout sa frustration de ne pas voir une attaque poussée jusqu’au bout, de ne jamais revoir la gonfle une fois celle-ci passée, de tout donner en défense alors que l’ensemble de ses coéquipiers songeaient avant tout à attaquer. C’est toute cette frustration qui aura poussé Pietrus à plier bagage pour la Floride.

A Orlando, Mike a trouvé un « chez lui » et une équipe qui joue au basket avec un vrai intérieur et où chacun connaît son rôle. Le joueur y nage comme un poisson dans l’eau et si une maudite blessure n’était pas venue pourrir sa saison, il aurait sûrement lutté pour le titre de meilleur 6ème homme de la ligue car dès le mois de novembre, l’international est parti sur de très bonnes bases. Avec 13ppg et 4rpg, Pietrus rentre directement dans les plans de Stan Van Gundy qui comprend très vite l’intérêt de compter un joueur comme lui dans son effectif. En sortant du banc, le français apporte son adresse à 3 points et sa défense. Une qualité bien utile quand on compte déjà le meilleur défenseur de la ligue dans sa peinture. Quand Mike et Dwight Howard sont ensemble sur le terrain, mettre des points devient très difficile. Si le reste de la saison fut en dent de scie à cause, encore une fois, de vilaines blessures récurrentes, Mickaël Pietrus a tout de même réussi son pari : s’imposer dans la rotation du Magic et prouver à tout le monde que la France compte un autre joueur de talent en NBA.

Des Playoffs révélateurs

Mais là où Mike a surpris tout son monde, c’est bel et bien durant ces Playoffs. A l’image de son équipe, que l’on attendait forte mais pas aussi performante, l’ailier est tout doucement monté en puissance au fil des tours. 5ppg contre Philadelphie, 12ppg contre Boston, 14ppg contre Cleveland, le tout agrémenté d’une défense de fer contre des Ray Allen et autres Lebron James. De 20 minutes par match le français est presque passé à 30 minutes de présence sur le parquet. Sixième homme de luxe, le numéro 20 d’Orlando a gagné en régularité et prend une part importante dans les victoires du Magic. Il est d’ailleurs le seul à avoir sorti la tête de l’eau lors du Game 1 contre les Lakers.

Mike Pietrus a la tâche ardue de rentrer dans le short du meilleur scoreur adverse, et quand ses joueurs se nomment Lebron James et Kobe Bryant, la mission vire à l’impossible. Contre Orlando et Pietrus, James s’est régalé avec 38 points par match mais l’important est ailleurs. Si l’antillais n’a pas stoppé la machine à scorer, il a, par contre, limité son influence sur ses coéquipiers en forçant James à s’employer pour impliquer son équipe, Orlando et le français ont réussi le tour de force de faire déjouer la meilleure équipe de la ligue.

Aujourd’hui, c’est Kobe Bryant qui se dresse devant Mike Pietrus et, vu le premier match, cette finale ne sera pas une promenade de santé pour le joueur. Comme il le reconnaissait devant la presse : défendre sur la star des Lakers est un tout autre challenge. Kobe est affamé de victoire et investi d’une mission. Concentré comme jamais, KB24 joue son entrée dans l’histoire et ce n’est pas Pietrus qui l’en empêchera ! Notre frenchie devrait donc reproduire la même stratégie que contre Lebron James et Cleveland. A savoir, limiter au possible la scoring machine et l’empêcher de rayonner sur ses coéquipiers.

Titre ou pas Mickaël Pietrus a d’ores et déjà remporté sa victoire. Unanimement reconnu, le français a enfin trouvé la crédibilité qu’il cherchait et nul doute que cette réussite ne sera pas sans lendemain. Les Spurs de San Antonio, qui s’était penché sur son cas, doivent se ronger les doigts de ne pas avoir tenté le coup. TP, lui, doit par contre garder ses mains bien au chaud car, comme il le rêvait, un Pietrus et un Diaw au top de leurs formes devraient donner une belle équipe de France à l’avenir.